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Mise en œuvre du Dalo et du Daho en Isère

Adoptée à l’unanimité le 5 mars 2007, la loi sur le Droit au logement opposable représente une conquête législative et sociale majeure. Elle permet aux personnes dépourvues de logement, vivant dans de mauvaises conditions de logement ou empêchées d’en trouver un adapté à leur situation, de faire valoir leur droit à un logement décent et indépendant. La loi de 2007 a également institué un droit à l’hébergement opposable.

Outre les résultats de l’application de la loi sur le logement et l’hébergement opposables dans le département, le rapport 2022 du comité de suivi, réalisé par l’Observatoire du logement et de l’hébergement d’Un Toit Pour Tous, offre un large tour d’horizon d’informations et de réflexions sur la loi et ses conditions d’application en Isère.

Des résultats de l’application de la loi encourageants

  • 58 % des ménages requérants Dalo ont été reconnus prioritaires en Isère, contre 33% au niveau national. Ce taux de priorisation atteint son plus haut niveau depuis la mise en œuvre de la loi.
  • 6 % seulement de ménages requérants ont refusé leur logement, ce taux est en baisse par rapport à l’année 2020.
  • Les recours ont augmenté de 34% par rapport à 2020, cette hausse peut être interprétée, en partie, comme une meilleure capacité des ménages de faire appel à la loi.
  • Pour la première fois des recours (indemnitaires) Dalo ont été gagnés auprès du tribunal administratif.

Des conditions d’application à surveiller de près

Il faut insister sur le phénomène de non-recours massif à l’utilisation de cette loi : estimé à 90% pour le Daho et 85% pour le Dalo. Plusieurs causes à ce phénomène :

 

  • le manque d’information et d’aide de la part de l’administration pour l’établissement des dossiers de demande ;
  • le taux de relogement faible : 49% seulement des ménages prioritaires ont été relogés à la suite d’un recours Dalo (contre 64% au niveau national) alors que le contingent de logements est largement suffisant ;
  • la gestion complexe des dossiers par l’administration avec parfois des demandes abusives qui retardent l’instruction et découragent les demandeurs ;
  • l’interprétation biaisée de la loi qui, localement du moins, est considérée comme un droit subsidiaire et dérogatoire, ce qui aboutit à une « mise en concurrence » avec le PALDHI et bloque le parcours Dalo ;
  • les pratiques locales des bailleurs sociaux et leur rapport avec l’administration conduisent parfois à la non-attribution de logement à un ménage pourtant reconnu prioritaire ;
  • le manque cruel de places d’hébergement, en particulier au sein de Grenoble Alpes métropole.

Il faut également souligner les pratiques de plus en plus inquiétantes à l’égard des requérants Daho en situation administrative précaire. La commission de médiation, sous l’influence de certains de ses membres, continue de prendre des mesures discriminatoires même vis à vis de demandeurs d’asile en situation régulière, contrairement à ce qui précisé dans la loi. À ce sujet, le comité de suivi préconise que seule la demande au 115 soit prise en compte dans le dossier. Pour en savoir plus à ce sujet, consulter le rapport en intégralité.

 

Il faut aussi noter que les décisions de la commission de médiation peuvent être inégales d’une commission à une autre en fonction des membres présents. Les structures, notamment associatives, sont représentées par des personnes physiques alors que les services de l’État le sont par des personnes pouvant être différentes d’une séance à une autre. L’avis de la commission est influencé par la présence/absence de certains membres et par le rôle prépondérant du président.

 

Enfin les démarches contentieuses sont trop peu suivies d’effet. D’une part ces démarches couvrent des temps trop longs par rapport à la situation d’urgence des requérants mais en plus, à l’issue, il n’y a aucune garantie d’avoir un logement ou un hébergement. Suivant la nature du recours soit le requérant est renvoyé vers la commission de médiation avec des délais supplémentaires, soit il est indemnisé par l’État mais parfois longtemps après, soit l’État est condamné à verser une somme à un fonds d’accompagnement vers et dans le logement.

 

Une veille nécessaire de l’application de la loi et un accompagnement

 

Le comité de suivi de la loi Dalo/Daho isérois, créé dès la mise en application de la loi et composé des représentants du monde associatif concerné*, de l’Équipe juridique mobile de la ville de Grenoble et de Grenoble-Alpes Métropole, publie un rapport chaque année.

 

Un accompagnement des demandeurs est assuré par la permanence hebdomadaire tenue par des bénévoles d’Un Toit Pour Tous depuis la mise en application de la loi. En 2021, 204 ménages ont été reçus, 159 recours ont été constitués (14% des recours reçus par la commission) et les autres renseignés ou réorientés vers d’autres acteurs.

Un accompagnement juridique lors de recours auprès du tribunal administratif est réalisé par l’Équipe juridique mobile de la ville de Grenoble. Mise en place en 2018 pour favoriser l’accès au droit et lutter contre le non-recours, elle a depuis déjà formé 250 professionnels, bénévoles et étudiants sur la loi, a assuré plus de 700 conseils et 200 accompagnements dans des recours.

Pour contribuer à ce que la loi remplisse mieux sa fonction sociale

L’utilité sociale de la loi est en effet bien illustrée par l’analyse des taux de recours Dalo/Daho. En 2021, les personnes seules qui représentent environ le tiers de la population iséroise (35% INSEE 2019) ont déposé 55% des recours. Ce sont 28% pour les familles monoparentales qui représentent environ le dixième de la population iséroise (9% INSEE 2019). Les profils des requérants sont le reflet des catégories de ménages qui sont le plus en difficulté pour accéder et se maintenir dans un logement adapté à leur besoin.

 

* ADIL (Agence départementale pour l’information sur le logement), CLCV (Association nationale de consommateurs et d’usagers), CNL (Confédération nationale du logement), CSF (Confédération syndicale des familles), l’accueil de jour Point d’eau, Un Toit Pour Tous.

 

Lire le rapport 2022